Shlomi Steve Levy was interviewed by Stéphanie Grammond for an article which appeared in the LaPresse. In the article, Stéphanie asks Shlomi about issues for Canadians who own US real estate and who are thinking of selling US real estate.
Stéphanie Grammond, LaPresse
November 5, 2018
Il y a 10 ans, la crise du crédit frappait l’immobilier en Floride comme un ouragan de force 5. Les snowbirds qui ont sauté sur les aubaines dans le creux de 2010 à 2012 ont fait des affaires en or. Les prix de l’immobilier étaient au plancher. Le dollar canadien volait à parité. Aujourd’hui, plusieurs passent à la caisse. Comment maximiser les gains et limiter l’impôt ?
Chronique
Les snowbirds passent à la caisse
Stéphanie Grammond, La Presse
Comme de nombreux snowbirds qui ont fait leur nid en Floride après la crise du crédit, Ron Gaudette vient de passer à la caisse. La remontée des prix de l’immobilier et du dollar américain lui a carrément permis de doubler sa mise en dollars canadiens.
En 2010, au plus profond du ressac, le Montréalais avait mis la main sur une copropriété flambant neuve dans un luxueux complexe de trois édifices à Hallandale, environ 20 kilomètres au nord de Miami.
Démoli par la crise des hypothèques à risque, le premier acheteur avait dû remettre les clés à la banque avant même de prendre possession de l’appartement de 1500 pieds carrés situé au 11e étage. Deux chambres à coucher, une immense terrasse surplombant la mer, un stationnement intérieur, l’accès à une spectaculaire salle d’entraînement et à un chapelet de piscines…
« C’était de toute beauté ! », s’emballe M. Gaudette. Négociateur dans l’âme, il avait offert 3000 $ au-dessus du prix plancher que la banque avait fixé 45 % sous le prix payé par le premier acheteur. Il n’en fallait pas plus pour surpasser les cinq autres offres concurrentes. C’est vous dire à quel point le marché était en solde.
Mais depuis, le vent a tourné. En 2016, M. Gaudette a revendu son condo en claquant des doigts. Il ne lui a fallu qu’une semaine pour obtenir pratiquement le prix qu’il demandait. Il a empoché une partie du gain et racheté un condo plus petit qui convient mieux à sa famille.
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Bien des Québécois profitent en ce moment de l’embellie pour vendre leur propriété dans le Sunshine State. « On a beaucoup de clients qui vendent », rapporte Shlomi Steve Levy, associé du cabinet de planification fiscale et successorale transfrontalière Levy Salis.
« La majorité ont acheté entre 2010 et 2015, alors que c’était la tempête parfaite. Ils ont fait de très beaux profits et on travaille avec eux pour minimiser le gain en capital et les retenues », ajoute-t-il.
Depuis cinq ans, les gains sont époustouflants. Par exemple, le prix moyen des maisons à Miami a rebondi de 53 %. Mais les snowbirds ont encaissé un gain de 91 % parce que le huard, qui volait à parité en 2012, a perdu de l’altitude.
Jamais les Québécois n’auraient fait autant d’argent en restant au froid. Depuis cinq ans, le prix des maisons n’a progressé que de 6 % à Montréal, tandis que la Bourse canadienne a gagné seulement 30 % (en date de la fin de juillet).
Mais les Canadiens qui ont acheté en Floride il y a 10 ans viennent tout juste de sortir la tête de l’eau. « Il y a trois ou quatre ans, il y avait encore beaucoup de propriétaires dont la valeur de la propriété était en dessous du montant de l’hypothèque », se souvient Michael Côté, président et chef de la direction de Natbank.
La vente de leur maison ne leur aurait donc pas permis de rembourser leurs dettes au complet. Maintenant qu’ils sont dans le « positif », certains en profitent aussi pour vendre.
D’autres Québécois qui veulent continuer d’aller en Floride préfèrent refinancer une portion de leur résidence, indique M. Levy.
Cela leur permet de rapatrier une partie de leurs gains au Québec en profitant du taux de change. Ils peuvent ensuite investir cet argent et déduire les frais d’intérêt sur leur hypothèque, puisqu’il s’agit d’un prêt à l’investissement. Si le dollar canadien remonte, ils pourront toujours en profiter pour rembourser leur hypothèque en dollars américains.
« Aux États-Unis, la plupart des banques permettent de rembourser l’hypothèque avant le terme, sans payer des pénalités comme c’est le cas au Canada », précise M. Levy.
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Pour les acheteurs, il n’est pas trop tard, même si l’élection de Donald Trump et l’ouragan Irma ont un peu refroidi les ardeurs des acheteurs québécois en Floride.
« Il y a encore de bons achats à faire. Mais il ne faut pas penser qu’on peut trouver quelque chose pour 25 000 $ au bord de la mer avec deux portes de garage ! », rigole Sylvie Barrette, courtier immobilier de Fort Lauderdale dont plus de la moitié de la clientèle provient du Québec.
Non, le marché n’est plus en solde. Mais il n’est pas complètement fou non plus. « Les valeurs ne sont pas exagérées comme il y a 10 ans », assure M. Côté. À preuve, les paiements hypothécaires sur une résidence de 300 000 $US se chiffrent à environ 1800 $US par mois, pratiquement l’équivalent d’un loyer moyen en Floride.
« C’est encore très raisonnable », dit le banquier, qui constate toutefois que les acheteurs ont changé leur modus operandi. Au lieu d’acheter avec de l’argent comptant, comme cela se voyait souvent lorsque le dollar était à parité et l’immobilier, à prix dérisoire, beaucoup d’acheteurs optent maintenant pour un financement.
Alors, à quoi s’attendre comme rendement pour les prochaines années ? À une croissance modérée d’environ 2 % par an, estime Matthieu Arseneau, économiste principal à la Banque Nationale.
« Compte tenu de la hausse des prix des logements des dernières années et de la hausse des taux d’intérêt, l’accessibilité au logement est revenue près de sa norme historique, dit-il. Cela limite le potentiel haussier, d’autant plus que notre scénario table sur des hausses de taux d’intérêt supplémentaires en 2018. »
Exemples de transactions récentes
Des gains époustouflants
Les snowbirds qui ont acheté en Floride dans les bas-fonds de 2010 à 2012 ont fait des gains époustouflants. Le huard volait à parité et le prix des maisons avait chuté de moitié. Aujourd’hui, plusieurs Québécois ont doublé leur mise. Voici des exemples de transactions glanés par Paul Connolly, un agent immobilier de la Floride qui compte plusieurs investisseurs québécois dans sa clientèle.
Stéphanie Grammond, La Presse
Maison de cinq chambres à coucher
Prix d’achat : 600 000 $US en 2011
Prix de vente : 905 000 $US en 2017
Gain : 97 % en dollars canadiens
Cinq chambres à coucher, trois garages, une piscine à couper le souffle… Le propriétaire avait mis la main sur cette luxueuse propriété de 5500 pi2 de la région de Palm Beach pour 600 000 $US en décembre 2011. C’était une véritable aubaine puisque le propriétaire précédent l’avait payée 1 million en 2005. Il vient de la revendre 905 000 $US. En considérant le gain de change, le snowbird a doublé sa mise et engrangé un profit d’environ 600 000 $CAN.
Copropriété de deux chambres à coucher
Prix d’achat : 155 000 $US en 2011
Prix de vente : 245 000 $US en 2017
Gain : 120 % en dollars canadiens
Le propriétaire avait déboursé 155 000 $US pour cette copropriété de 1225 pi2 située directement sur le bord de l’Intercoastal à Boynton Beach. C’était carrément la moitié du prix payé par le vendeur en 2004. Le printemps dernier, l’heureux propriétaire a réussi à revendre son unité en moins de trois semaines. En six ans, son investissement en Floride lui a donc valu un gain d’environ 60 % en dollars américains et 120 % en dollars canadiens. Qui dit mieux?
Floride
Huit clés pour mieux vendre
Stéphanie Grammond , La Presse
Les Québécois qui empochent leurs profits en Floride doivent être vigilants. « Souvent, les petits investisseurs ont été mal guidés au départ et ils se retrouvent avec des problèmes d’impôt à la vente », prévient Paul Connolly, agent immobilier chez Invest Miami.
Pour limiter la facture fiscale, voici huit éléments à considérer, selon Shlomi Steve Levy, associé du cabinet de planification fiscale et successorale transfrontalière Levy Salis.
1) Comment esquiver les retenues?
Pour s’assurer que les étrangers ne se sauvent pas sans payer leurs impôts, le gouvernement américain applique une retenue de 15 % sur le produit de la vente de votre maison. Si vous vendez un condo 200 000 $, par exemple, l’Oncle Sam retiendra 30 000 $, que vous ayez de l’impôt à payer ou non.
Mais différentes stratégies permettent d’esquiver cette retenue temporaire. Entre autres si vous prévoyez que votre gain en capital sera inférieur au montant de la retenue, vous pouvez transmettre à l’Internal Revenue Service (IRS) une demande de « certificat de retenue » qui permettra de réduire le montant de la retenue.
« Dans une période où le taux de change varie, plus on peut rapidement rapatrier l’argent au Québec, mieux c’est », dit M. Levy. En mars dernier, il a vu un propriétaire perdre 12 000 $ parce que le gain sur sa résidence était resté coincé aux États-Unis trop longtemps.
2) Comment peut-on réduire l’impôt?
Il est possible de réduire la facture d’impôt en soustrayant du gain en capital une série de dépenses : la commission du courtier, les honoraires d’avocats, les rénovations et même les charges de copropriété extraordinaires.
« Comme les frais de condo ne sont pas déductibles, de nombreuses personnes ne savent pas que les cotisations spéciales versées durant toute la période de détention peuvent servir à réduire le gain », précise M. Levy.
Pour les propriétaires qui revendent un terrain vacant, sachez que toutes les taxes et les dépenses d’entretien (installation d’une clôture, tonte de la pelouse, élagage des arbres, etc.) peuvent aussi réduire le gain en capital.
3) Comment déclarer son gain?
Tout d’abord, les particuliers qui vendent une maison aux États-Unis doivent payer au fisc américain des impôts sur le gain en capital, soit l’écart entre le prix d’achat et le prix de vente en dollars américains. Le taux d’imposition s’élève à 15 % sur la première tranche de 400 000 $ de gain, puis 19,6 % pour les gains excédentaires.
À noter : Les Canadiens ont jusqu’au 15 juin de l’année suivante pour remplir une déclaration de revenus (1040NR) et l’envoyer au fisc américain pour la disposition du gain aux États-Unis en dollars américains.
4) Doit-on payer l’impôt en double?
Non, rassurez-vous. La facture d’impôt combinée sera exactement la même que si vous aviez vendu une propriété au Québec.
« Si la transaction est bien structurée, il n’y a pas de double imposition. L’impôt sur le gain en capital payé aux États-Unis donne droit à un crédit d’impôt étranger au Québec, ce qui fait que l’on paie seulement la différence au Québec », explique M. Levy.
Au Québec, la moitié du gain est imposable au taux marginal du contribuable. Ainsi, vous paierez un maximum de 27 % d’impôt sur votre gain, puisque le taux d’imposition le plus élevé s’élève à 53 % à partir d’environ 200 000 $ de revenus.
5) Et le gain de change dans tout cela?
Disons que vous avez acheté une maison en Floride pour 300 000 $US, alors que le dollar était à parité, et que vous l’avez revendue 500 000 $US, soit environ 650 000 $CAN.
Aux États-Unis, vous devrez payer 15 % d’impôt sur votre gain de 200 000 $US. Mais au Canada, il faudra payer jusqu’à 27 % d’impôt sur le gain en capital de 350 000 $CAN, dont le gain de change de 150 000 $CAN.
Vous pourriez donc avoir à payer jusqu’à 95 000 $CAN d’impôts au Canada, alors que le crédit d’impôt américain ne sera que de 30 000 $US.
6) Peut-on utiliser son exemption de résidence principale?
Oui, les Canadiens peuvent utiliser leur exemption de résidence principale canadienne sur une résidence secondaire qu’ils occupaient aux États-Unis, mais uniquement pour effacer le gain imposable au Canada.
Cela dit, un ménage ne pourra pas utiliser cette exemption pour une autre résidence au cours des mêmes années de détention, puisque l’exemption ne s’applique que sur une maison par ménage. Quand une famille possède plus qu’une résidence, il faut faire le calcul et choisir celle qui a enregistré le gain imposable le plus important sur la période de détention.
7) Peut-on effacer son gain en capital?
Si vous avez réalisé un gain en capital au Canada, lors de la vente d’une résidence en Floride, il est possible d’effacer ce gain en utilisant des pertes en capital que vous avez subies sur d’autres placements.
Faites le tour de votre portefeuille : peut-être vaudrait-il la peine de vendre certains titres qui ont baissé pour déclencher des pertes ?
Vous pouvez aussi utiliser des pertes en capital que vous avez encaissées dans le passé pour réduire votre gain, puisque les pertes sont reportables éternellement dans le temps. Et si vous encaissez des pertes dans le futur, il sera toujours possible de vous en servir pour effacer des gains des trois dernières années… et effacer rétroactivement des impôts que vous avez déjà payés.
8) Qu’est-ce que la « GoodBye Tax »?
Un dernier petit détail en terminant. Aux États-Unis, c’est le vendeur qui doit payer le droit de mutation, communément appelé « taxe de bienvenue » au Québec. En Floride, c’est plutôt une « Goodbye Tax », blague M. Levy. Elle représente 0,7 % du prix de vente. Pour une propriété de 300 000 $, la facture s’élève donc à 2100 $.
About the author
Shlomi Steve Levy is a Partner of Levy Salis LLP and is a member of the Quebec Bar, the Law Society of Ontario (L3), the Society of Trust and Estate Practitioners, and the Canadian Bar Association.